24 juin 2007

L'Europe contre les peuples, par Nicolas Dupont-Aignan

L’accord des 27 dirigeants ce matin à l’aube est un mauvais coup contre le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes.

On assiste à la revanche des fédéralistes européens qui n’avaient pas supporté les NON français et hollandais à la Constitution européenne. Une revanche minutieusement préméditée puisque cette fois-ci tout est fait pour éviter de consulter les peuples. La ficelle est un peu grosse mais la manœuvre est habile.

Tout d’abord les dirigeants européens ont joué la crise pour faire croire à l’opinion que la panne d’Europe était la conséquence des refus français et hollandais alors qu’elle en était au contraire la cause. Ensuite ils ont minoré l’impact du traité le faisant passer pour un simple compromis entre les pays qui ont voté la Constitution et ceux qui l’ont refusé. Enfin, ils en déduisent que cela ne sert donc à rien de consulter les peuples et que les parlements feront bien l’affaire.
La réalité est bien évidemment tout autre. Le traité dit simplifié est une Constitution bis. Il reprend le cœur institutionnel du texte de 2005 qui consacrait l’Europe supranationale.

  • l’extension du domaine du vote à la majorité qualifiée supprime le droit de veto dans des secteurs clefs (immigration, négociations commerciales, sécurité intérieure etc…) C’est pour la France une catastrophe puisqu’elle est minoritaire dans une Europe à 27. La position de Nicolas Sarkozy est à cet égard incompréhensible. Comment peut-il la veille à Paris menacer les négociations commerciales à l’OMC d’un veto français alors qu’il s’en prive pour toujours le lendemain à Bruxelles ?
  • la personnalité juridique unique de l’Union et l’intégration de la charte des droits fondamentaux par une référence au traité affirme le super Etat européen (la Grande Bretagne a obtenu une exception) ;
  • la règle de la double majorité est acceptée (même si elle ne s’appliquera qu’en 2014 – 2017) et déséquilibre le couple franco allemand plaçant l’Allemagne en position de force au cœur de toutes les majorités.
Les différences entre le nouveau traité et l’ancienne constitution sont superficielles. Le France se targue d’avoir obtenu des avancées. Dans l’article sur les objectifs de l’Union, Nicolas Sarkozy a obtenu de supprimer la référence à la concurrence « libre et non faussée » mais ce principe est maintenu dans les traités existants !

Le Ministre des affaires étrangères perd son titre mais garde ses compétences. Il y a certes un protocole sur les services publics mais comment les sauvera-ton quand on sera mis en minorité au Conseil européen ?

En vérité, la supercherie est bien là. Pour endormir les Français on a supprimé le paquet cadeau et les rubans mais on a gardé le même produit. L’adoption de ce Traite représenterait un pas décisif vers la supranationalité. Cela conduirait un peu plus à la dépossession des peuples de leur souveraineté démocratique. Malgré leur refus ils pourraient en effet se voir appliqué dans de multiples domaines les dispositions législatives.

Pour la France, au modèle social et républicain minoritaire dans l’Europe à 27 cela signifierait la condamnation à mort de son exception et la fin de son indépendance. On ne peut pas comme vient de le faire Nicolas Sarkozy d’un côté se faire élire sur le refus de la pensée unique, la baisse de l’euro, une nouvelle protection aux frontières, et de l’autre côté accepter à Bruxelles les mécanismes des décisions supranationaux qui, nous mettant en minorité, empêcheraient la France de se redresser.

C’est pourquoi, tous ceux qui croient encore possible une autre politique pour notre pays doivent combattre ce texte. Il faut réveiller les peuples, leur expliquer les conséquences pratiques sur leur vie quotidienne. En France j’invite tous ceux qui ont voté NON à la Constitution européenne à se mobiliser pour exiger un référendum. L’UMP n’a pas au Parlement la majorité des 3/5ème lui permettant de faire voter la révision constitutionnelle préalable à l’adoption du traité. Il faut donc faire pression sur chaque Député quel que soit son parti pour lui demander de respecter le peuple en le consultant.

Comment en effet les dirigeants européens peuvent-ils croire sérieusement bâtir l’Europe en maîtrisant à ce point les peuples ? Ce coup de force ne doit pas passer, c’est aussi une question de moral politique. Il faut par ailleurs bien sûr préparer une autre Europe, celle des coopérations projet par projet qui respecte les Nations tout en leur permettant de relever les défis de la mondialisation.

Voilà le bel enjeu des deux prochaines années ! Faire aimer l’Europe en délimitant les frontières, en réformant l’euro, en rédigeant un vrai traité pour une confédération d’Etats nations.

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