20 février 2009

Non à la réintégration dans le commandement intégré de l'OTAN !

Pour la première fois depuis longtemps, le quotidien Le Monde a publié une tribune de Nicolas Dupont-Aignan contre la réintégration de la France dans le commandement intégré de l'OTAN. Vous trouverez ci-dessous le texte de cette tribune.


Non à la France du renoncement !, par Nicolas Dupont-Aignan LE MONDE 20.02.09 14h10 • Mis à jour le 20.02.09 15h20

Sans en avoir dit le moindre mot durant la campagne présidentielle, Nicolas Sarkozy a solitairement décidé le retour de la France dans le commandement militaire intégré de l'OTAN, dont l'avait sortie le général de Gaulle en 1966.

Il avance trois arguments, mais aucun ne résiste à un examen sérieux. En premier lieu, la disparition de la menace soviétique justifierait ce retour dans l'OTAN. Argument bien étrange : la fin du pacte de Varsovie aurait dû, au contraire et depuis longtemps, permettre la redéfinition de l'Alliance atlantique dans le sens d'une émancipation de la défense européenne, certes partenaire des Etats-Unis, mais non plus sous tutelle. Devant la commission de la défense à l'Assemblée nationale, mardi 17 février, MM. Morin et Kouchner eux-mêmes ont d'ailleurs reconnu "qu'il faut réfléchir à l'avenir de l'OTAN". N'est-il pas plus sage et plus logique de le faire avant le retour complet dans l'OTAN qu'après ?

Les circonstances ont bel et bien changé. Mais cela souligne l'audace visionnaire du général de Gaulle : l'émergence d'un monde multipolaire. Il serait donc complètement contre-productif pour la France, qui a vu juste avant tout le monde, de se renier, notamment face aux pays émergents trop souvent qualifiés d'adversaires par la doctrine américaine du "choc des civilisations". Notre pays verrait sa position internationale diminuée, il se priverait d'une carte maîtresse vis-à-vis du monde comme de ses partenaires européens.

Deuxième argument : il vaut mieux être à l'intérieur qu'en dehors pour peser sur les décisions. Mais le départ de la France de l'OTAN, en 1966, fut motivé par le refus répété des Etats-Unis de partager le pouvoir en son sein. Aujourd'hui, les choses ont-elles vraiment changé ? Exception faite de deux petits commandements secondaires promis par Barack Obama, rien ne permet de le croire, au contraire. Et lorsque Nicolas Sarkozy a décidé d'envoyer des renforts français en Afghanistan, il a voulu faire croire que cela permettrait d'infléchir la stratégie américaine dans ce pays : il n'en est rien et on s'enfonce chaque jour davantage dans un bourbier.

"JEU DE DUPES"

Enfin, ce serait le seul moyen de faire "l'Europe de la défense". Mais à quoi bon, si celle-ci doit être une simple succursale de l'OTAN en Europe, et non un instrument autonome de sécurité au service de sa propre vision du monde ? Et comment convaincre nos voisins, dont l'appartenance à l'OTAN est le prétexte à négliger leur propre effort de défense, de s'investir dans une ambitieuse coopération militaire dès lors que le principal pays moteur, le nôtre, renoncerait à son tour ?

Ainsi, le "jeu de dupes" diplomatique que dénonçait récemment Alain Juppé n'est-il qu'un des aspects de la normalisation atlantiste de notre pays qui, dans les faits, renonce. "La volonté qu'a la France de disposer d'elle-même est incompatible avec une organisation de défense où elle se trouve subordonnée", disait de Gaulle. Appliquez cette phrase, toujours pertinente, à l'actuelle politique présidentielle vis-à-vis de l'OTAN, et vous déduirez que l'acharnement de Nicolas Sarkozy à subordonner notre pays aux Etats-Unis signifie son renoncement à une France ayant la volonté et la capacité à disposer d'elle-même sur la scène internationale.

Preuve indiscutable, le chef de l'Etat aborde ce retour dans l'OTAN après avoir, en 2008, imposé un Livre blanc qui prévoit, en cinq ans, une diminution drastique de notre effort de défense à 1,2 % du PIB (hors pensions et budget de la gendarmerie), soit très loin derrière la Grande-Bretagne et à peine au niveau de l'Allemagne qui, pourtant, assume des obligations opérationnelles bien moindres que les nôtres.

Cessons de tourner autour du pot : le débat n'est pas technique, mais idéologique. En réalité, Nicolas Sarkozy fait partie de cette droite férocement atlantiste, en complet décalage avec le sentiment profond du peuple français auquel Charles de Gaulle avait rendu sa dignité. "Mon pays ce n'est pas la France, c'est la France libre", disait Romain Gary. Pour moi, c'est clair : la France soumise n'est pas et ne sera jamais la France.

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