06 juin 2008

Debout la République dans le débat institutionnel

Vous trouverez ci-dessous une tribune de Nicolas Dupont-Aignan que l'on peut lire sur le site Rénovation démocratique.org, le portail d'information et d'échange sur la rénovation démocratique. Il est clair que la Constitution voulue et mise en place par le général de Gaulle n'existe plus. La Vème République n'en a plus que le nom. La pratique des Institutions en à tuer l'esprit et en train en exterminer la lettre. A Debout la République, nous défendons les institutions inspirés par le gaullisme et nous souhaitons qu'elles intègrent plus de démocratie que méprise ceux qui les pratiquent. Enfin, le marchandage actuel n'est pas digne du débat sur un sujet de cet importance. La décision par référendum reste toujours la voie la plus pertinente à ce sujet.


L'étouffement de notre démocratie

Une bonne Constitution répond à deux objectifs principaux : la stabilité du pays, la vitalité de sa démocratie. Les institutions de 1958, pour mettre un terme à l’instabilité chronique du régime d’assemblée des IIIe et IVe République, a confié de grands pouvoirs à l’exécutif. Ce renforcement s’est toutefois accompagné de l’élection du Président au suffrage universel direct en 1962, et d’une pratique référendaire, permettant aux moments cruciaux de trancher les grandes querelles. Pour le Général de Gaulle, le bénéfice d’une grande autorité obligeait à asseoir celle-ci sur une légitimité suprême et incontestable, celle de la souveraineté populaire elle-même – qui, toujours d’après de Gaulle, «se confond avec la démocratie». Bref, à grand pouvoir, grande responsabilité.

Malheureusement ses successeurs ont conservé les pouvoirs tout en s’affranchissant de la responsabilité : le quinquennat d’une part, la formation d’un parti quasi unique à droite de l’autre, ont encore accentué la concentration des pouvoirs, tandis que le dévoiement progressif de la pratique référendaire - jusqu’au déni du résultat du 29 mai 2005 – a gravement affaibli la fonction de contrôle de la démocratie directe.

Une réforme constitutionnelle pour rééquilibrer le système est donc souhaitable. Malheureusement, le projet débattu à l’Assemblée Nationale n’est qu’un trompe-l’œil. Le Président veut faire croire qu’il est un grand réformateur et un grand démocrate. Mais, en réalité, il ne touche en rien aux causes profondes de l’étouffement de notre démocratie.

Rien n’est prévu, par exemple, sur le mode d’élection des Députés. Or, le système majoritaire, dans le nouveau contexte de l’UMP et du quinquennat, est devenu un véritable étouffoir démocratique, reconstituant un régime des partis que le fondateur de la Ve République, on le sait, avait vigoureusement combattu. Ironie de l’histoire, l’oxygénation du système par l’introduction d’un peu de proportionnelle est devenue la seule solution pour empêcher la domination presque sans partage de deux partis larrons en foire, le PS et l’UMP, qui représentent de moins en moins d’électeurs. Je refuse bien sûr la proportionnelle intégrale, qui replongerait le pays dans l’instabilité, mais je crois nécessaire pour permettre une meilleure représentativité de l’Assemblée Nationale, l’instillation d’une dose de proportionnelle. Sans cette rupture, les nouveaux pouvoirs donnés au Parlement ne représentent qu’un leurre, car il s’agit de donner des compétences nouvelles au parti dirigé depuis l’Elysée.

Rien non plus pour conforter l’usage du référendum. La suppression en suspens du référendum obligatoire sur l’adhésion de nouveaux pays à l’Union européenne, comme l’usine à gaz du référendum d’initiative populaire, n’augurent rien de bon. Le seuil de déclenchement de ce référendum d’initiative populaire est en réalité bien trop élevé pour que la réforme soit opératoire…

Rien ensuite sur la question centrale des médias. Pour garantir le pluralisme et sortir de la dérive bananière de notre République, il faut, comme dans la plupart des pays occidentaux, interdire aux groupes financiers dépendant des commandes de l’Etat de détenir de grands médias.

Surtout rien n’est envisagé sur la question clé du contrôle de l’Union européenne. Les directives négociées par les Ministres à Bruxelles le sont dans le dos du Parlement. Le grand problème est que la négociation européenne relève de la sphère diplomatique (et donc du pouvoir discrétionnaire de l’exécutif) alors qu’elle porte sur des sujets relevant éminemment du domaine de la loi, c'est-à-dire du Parlement. Les directives bruxelloises sont ainsi de nature législative mais les parlementaires sont la plupart du temps sommés de les retranscrire quelques années plus tard en droit interne, sans débat ni réel pouvoir d’amendement, par ordonnance.

Enfin, que dire de certains gadgets, comme l’inscription des langues minoritaires et régionales dans la Constitution, dont l’application pourrait cependant réserver de très désagréables surprises ?!

Démocratiser la Ve, bien sûr ! À deux conditions : tout d’abord s’attaquer aux vraies questions, ensuite maintenir la garantie de la stabilité. En vérité, cette réforme s’apparente de plus en plus à un jeu politicien entre le Président et l’opposition. Une sorte de donnant-donnant qui consacrerait un accord minimal de deux partenaires à bout de souffle. Le régime des deux partis cherche à faire main basse sur des institutions qui peuvent pourtant faire merveille si celui qui préside a une vision, une politique, un appui du peuple.

Nicolas Dupont-Aignan


Illustration: "La Vérité amène la République et l'Abondance", par Nicolas de Courteille, 1793. Conservé au Musée historique de la Révolution française. Pour en savoir plus sur ce tableau: cliquez-ici. © Photo RMN - M. Bellot

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