07 octobre 2007

Intervention de Nicolas Dupont-Aignan sur le Grenelle de l'Environnement

Dans une allocution lors d'un débat sans vote à l'Assemblée Nationale, Nicolas Dupont-Aignan a exprimé les conditions de la réussite du Grenelle de l'Environnement orchestré par le Gouvernement avec l'aide de nombreuses personnalités et Organisations Non-Gouvernementales. Voici ci-dessous le texte des cette intervention. N'hésitez pas à laisser votre commentaire afin d'ouvrir aussi le débat environnemental chez nous.


Monsieur le Ministre de l’environnement, changeons les règles de l’OMC !

Monsieur le Ministre,

La convocation d’une table ronde nationale où la plupart des problèmes sont posés sans tabou et où chacun peut s’exprimer, est une chose suffisamment rare pour être saluée. Vous le savez, je n’ai pas pour habitude de ménager mes critiques lorsque l’intérêt du pays me paraît menacé.

C’est pourquoi, inversement, je suis d’autant plus à l’aise pour saluer le « Grenelle de l’environnement » dont vous menez avec fermeté et ouverture d’esprit les débats.

Vous semblez vouloir prendre à bras le corps le fond des choses, ce qui est à la fois louable et sage. Louable, car dans ce domaine essentiel pour notre avenir à tous la situation exige désormais des résultats rapides et concrets. Sage, car aujourd’hui les Français ne se contenteront plus de simples pétitions de principes, qu’ils sanctionneraient le moment venu avec la dernière fermeté.

Vous me permettrez donc, Monsieur le Ministre, de vous adresser tous mes encouragements pour tenir bon face aux obstacles de toute nature, aux pressions des uns ou des autres, ou alors aux gros yeux de Bruxelles qui prétendrait une fois de plus faire la leçon au peuple français, ce cancre de la classe européenne qui s’imagine parfois encore, suprême arrogance, pouvoir décider de son propre destin !

Du courage, donc, il vous en faudra pour faire avancer le développement durable dans le domaine, par exemple, des transports urbains, et encore plus pour le faire progresser non pas seulement au niveau national, mais aussi aux niveaux européen et mondial, là où précisément il prend tout son sens. Mon temps de parole étant compté, vous me permettrez de revenir rapidement sur ces deux points.

Elu francilien de la grande Couronne, la nécessité de transports écologiques et adaptés aux besoins des utilisateurs me paraît vitale. On parle beaucoup, et on a raison, de la maîtrise du trafic automobile en Ile-de-France et dans les grandes agglomérations. Sur ce point, je souhaite insister combien il est nécessaire de ne pas aborder cette question par le petit bout de la lorgnette : c’est d’une politique d’ensemble, multimodale et coordonnée entre les différentes collectivités, dont nous avons besoin.

J’entends parler, par exemple, d’une réduction de 10 km/h de la vitesse maximale autorisée sur nos réseaux routiers. Pourquoi pas, mais veillons au respect de la limitation actuelle et surtout imposons le bridage des moteurs. Pour que chacun acquitte sa part, instaurons également une éco-pastille proportionnelle à la pollution générée par les véhicules et une taxe sur le trafic poids lourd de transit, à l’instar de certains pays européens. Naturellement, l’intégralité du produit de ces taxes serait versée à un fonds national pour la création d’infrastructures durables : le ferroutage, la construction de lignes de tramway dans les villes moyennes, etc. Soit dit en passant, ainsi pourrait-on réparer la politique de Gribouille de la cession au privé de nos sociétés d’autoroute qui, faut-il le rappeler, prive la collectivité des 20 milliards d’euros pour financer les infrastructures nécessaires de ces vingt prochaines années…

Mais il faudra savoir aller jusqu’au bout de la démarche : qui dit réduction de la pollution atmosphérique, dit également développement de transports en commun dignes de ce nom : en effet, le meilleur moyen de limiter la circulation automobile n’est pas d’interdire la voiture mais d’offrir des transports en commun sûrs, ponctuels et suffisants : plutôt que d’engloutir 800 millions d’euros dans la ligne T3, n’aurait-il pas été préférable de pousser les feux du « Métrophérique » ou, plus simplement de moderniser la ligne D du RER dont l’activité représente plus de 10% du trafic national quotidien mais dont les infrastructures sont scandaleusement vétustes (certains aiguillages datent de 1927 !), les rames souvent dégradées et la fréquence de la liaison avec Paris notoirement insuffisante ?!

Comment, enfin, dénoncer la pollution automobile et ignorer à ce point la pollution générée par le trafic aérien ? Je déplore profondément, Monsieur le Ministre, que vous n’ayez jugé bon d’intégrer à votre réflexion cette problématique majeure pour toutes les zones urbaines limitrophes des aéroports. Comment admettre que l’éco-pastille ne soit envisagée que pour le trafic terrestre, alors que la pollution au kérosène constitue une cause décisive de la dégradation de la couche d’ozone ? Comment mettre de côté la pollution du bruit, qui est non seulement devenue la préoccupation majeure des riverains des aéroports mais aussi des autres habitants des grandes agglomérations urbaines ? Il y a là, Monsieur le Ministre, des lacunes que vous aurez à cœur, je l’espère et je vous y engage vivement, de combler !

Ce sont là des efforts difficiles, une politique ambitieuse, qu’il nous faudra savoir mener pour réellement relever le défi du développement durable. Mais tous nos sacrifices à l’échelle nationale seront vains, vous le savez Monsieur le Ministre, Chers Collègues, si nous n’obtenons pas des grandes puissances économiques mondiales qu’elles changent elles aussi de comportement et ce, de manière radicale.

La France devra ainsi avoir le courage de dire son fait à la Commission de Bruxelles qui veut imposer les OGM dans nos assiettes. Soit dit en passant, l’exemple des OGM doit nous alerter sur le danger du traité européen simplifié, qui aggraverait encore cette fuite en avant irresponsable dans le fédéralisme européen. Au-delà, notre pays devra aussi avoir le courage de se battre pour changer les règles de l’OMC, instaurer des droits de douane écologiques contre les produits ne respectant pas nos normes ISO (je pense à des droits de douane progressifs, augmentant de 5% chaque année en sorte d’inciter les entreprises concernées à s’adapter), créer une taxe carbone qui intègre au prix des produits importés le coût environnemental de leur acheminement, etc.

J’entends d’ici les cris d’orfraie de certains bons docteurs « ès-mondialisation heureuse », qui nous expliqueront que c’est impossible et antiéconomique. Je suis pour ma part absolument convaincu du contraire : nécessité évidente pour la sauvegarde de la planète, la régulation environnementale de l’économie mondiale pourrait constituer un sas vers la non moins nécessaire régulation économique et sociale de cette mondialisation-clochardisation déloyale, qui nous entraîne irrémédiablement sur la pente de la dépendance, de l’appauvrissement et de la régression tous azimuts.

Paradoxe qui n’en est sans doute pas un mes Chers Collègues, et j’en terminerai là, la lutte pour la sauvegarde de la planète pourrait bel et bien être une étape indispensable à un autre combat, non moins nécessaire mais hélas oublié en ces temps de retour à l’état de nature pour cause d’hyper-capitalisme sans foi ni loi : le combat pour le Progrès, matériel et moral, du genre humain.

Je vous remercie.

Nicolas DUPONT-AIGNAN
Député non-inscrit de l’Essonne
Président de Debout la République

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